Bonjour à tous,
je viens réagir sur ce forum à l'invitation de " Grand Zèbre".
Beaucoup de choses à dire par rapport à cet article dans Agoravox
http://www.agoravox.fr/article.php3?id_article=16775
D'abord oui, je trouve que cet article simplifie le problème. Mais il a au moins le mérite de le présenter. Ensuite je pense qu'il est un peu à côté de la plaque en ce moment. D'abord parce qu'il y a un film comme "Indigène" qui prouve que même si c'est difficile on peut faire un film sur un sujet aussi délicat en France. Preuve que les choses bougent. Mais bon, j'ai envie de dire il était temps... ( vous croyez pas!!!...)
Dans un autre registre 36 Quai des Orfèvres a été je crois fait par un ancien flic reconverti en Réal. Son propos est sombre, tiré si je me souviens bien d'expériences et de relations personnelles.
La "Police Nationale" ne ressort pas "grandit" de la vision du Film, au contraire, mais certains policiers oui.
D'ailleurs dans une thématique pas si éloigné je vous conseille d'aller voir Black Book de Paul Verhoeven qui concerne la résistance hollandaise et les collabo nazis de l'époque. Ce film a eu un financement européen ( hollande, UK, Allemagne, Belgique) et devinez, comme par hasard il n'a pas eu de financement français. l'histoire du financement des films ( en France) me fera toujours autant sourire ( cyniquement) que l'histoire elle-même.
Mais passons à vos réactions: Celle épidermique que l'on retrouve d'ailleurs aussi sur Agoravox. Finalement ce sont elles qui m'attriste le plus. On rentre dans le schéma de confrontation classique:
Cinéma Américain= Idiot & Commercial
Cinéma Français= Intelligent & Incompris (ouarf )
Personnellement je trouve ce schéma aussi réducteur ( si ce n'est plus...) que les films auxquels il voudrait s'appliquer.
Donc je ne m'étendrai pas là-dessus ca me semble complètement inutile.
Ensuite concernant la définition de l'Art ( Hum... on a pas fini là)
A mon sens ce n'est pas une question de définition qui se pose mais plutôt
une question de champs d'application.
D'abord un film vu sur grand écran dont la place a été payé n'est pas une oeuvre d'art au sens classique c'est un "produit artistique" que cela plaise ou non. Que cela en rebute certain, cela n'en est pas moins une combinaison de facteurs artistiques et commerciaux qui sont intimement liés.
Concernant son champ d'application: A mon sens tous les sujets doivent pouvoir être abordés. Rien ne doit être laissé de côté du moment que le film trouve une audience aussi minime soit-elle. mais dans ce cas, il vaut mieux essayer d'adapter son budget au public concerné...
Et, c'est là que le cinéma français a un problème: à cause des subventions.
Elles sont délivrés par des organismes publics. Si vous faites un projet un tant soit peu polémique surtout au regard des instances dirigeantes, vous allez au casse-pipe assuré. On essayera même de vous en dissuader par tous les moyens possible et inimaginable quitte à essayer de vous discréditer ( ce n'est pas du vécu, mais j'ai pu observer à plusieurs reprises le phénomène). Pour résumer l'impartialité sur les sujets et genre développés n'existent pas.
Maintenant s'il s'agit de cours-métrages fait pour l'art et le plaisir, je vois pas pourquoi on se pose toutes ces questions.Même si certains de ces courts ont pour vocation de montrer le talent de leurs géniteurs. A mon sens il faut "faire" ce qu'on a envie point! Et je ne vois franchement pas pourquoi on devrait faire intervenir des subventions également à ce niveau là. Mon point de vue peut paraître dur, mais sincèrement produire un court aujourd'hui ne demande pas les moyens que cela demandait il y a encore 10-12 ans. J'ai vu quelqu'un louer un banc de montage 16 mm pour son film perso et payer pour cela. Maintenant on a tout à la maison sur un ou deux ordinateurs...
comme le fait remarquer grand zèbre:"Ce qui est hallucinant avec le système libéral américain, c'est que s'ils arrivent à faire du fric avec un film qui dénonce leur système libéral, ils disent banco."
En France tu as de la liberté artistique tant qu'elle ne coute rien à personne ensuite c'est une autre histoire... On est aussi dans un système libéral mais il faut en plus qu'il soit consensuel. Donc il faut aussi distinguer liberté de création à celle plus difficile à obtenir de liberté de distribution.
Enfin je tenais à signaler que beaucoup de nos talents nationaux partent à l'étranger depuis quelques temps pour cause de ras le bol complet et manque de moyens. Et comme par hasard ces talents qui trouvent à s'exprimer ailleurs ( souvent aux US) s'exportent bien. Pour ma part j'en connais certain personnellement. Et leur démarche à du sens: travailler aux US ( ou pour les US) c'est déjà la garantie d'être mieux payé (parfois largement mieux) qu'en France et d'être tout de même très compétitif vis à vis des talents américains.
( la délocalisation n'est pas un phénomène unilatéral)
Ca donne à réfléchir...
Autre problème très sérieux que nous avons en France, c'est la destruction quasi-systématique la profession de scénaristes depuis en gros ( je grossis le trait) "La Nouvelle Vague" genre pétard mouillé on a pas mieux fait. Maintenant en France on a une "politique" des "auteurs" défendu par la SACD et les autres organismes protecteur desdits droits. Quand la plupart des gens seront allés voir ce qu'est la SACD de plus près, je suis sûr qu'ils auront un autre avis sur le sujet.
Cette destruction s'est faite via une formation de plus en plus insuffisante.
( Combien de gens qui écrivent des scénarios savent ce qu'est l'ironie dramatique???)
Un dénigrement du métier au profit de ceux liés spécifiquement à la production d'images. Et un transfert de pouvoir vers le réalisateur/auteur.Ce point me semble d'ailleurs aussi valable en France qu'aux Etats-Unis. Et pour ma part je ne trouve pas que ce soit un mal.
La différence tient surtout au fait qu'aux US il existe une tradition, un seul et même métier de Producteur/Scénariste qui reste très vivace de nos jours dans le cinéma indépendant mais aussi parfois dans des gros projets dont ils sont les initiateurs et même à la tv. Et qui, bien entendu contrebalance fortement le pouvoir du réal. Et c'est encore là que le bas blesse en France on n'a pas de tradition équivalente.
Et de toute façon en réfléchissant un minimum on est bien obligé d'admettre que le problème en soi n'est plus national. Les oeuvres de l'esprit peuvent atteindre de fait une audience internationale et ce très rapidement. Donc la question qui se pose c'est plutôt ( et là ca me semble intéressant) comment adapter en Europe des petites structures de Prod/Scénariste aux marchés et à la distribution d'aujourd'hui et de demain. Et c'est là que se situe le vrai enjeu, parce que si ces structures peuvent exister alors des projets indépendants ayant tout autant "le sens des affaires" que des "gouts artistiques fortement marqués", pourront voir le jour.
Nous avons la chance d'être à une époque ou les moyens techniques n'ont jamais été aussi nombreux et surtout accessible pour la création, la production décentralisé, voire la distribution décentralisé. Il faut y coller à mon sens
des structures juridique et économique semblable, mais c'est un autre sujet.
La réflexion qui consiste à prétendre qu'il ne faut pas prendre de risque est complètement faussé par l'appétit des publics. C'est d'ailleurs certainement la plus grosse escroquerie du système actuel. Elle sous-tend en filigrane qu'à titre personnel il ne faudrait pas en prendre... Mais rien de bon ne sort d'un projet lorsque l'on n'y met pas un peu ( voir beaucoup) ses tripes.
Parfois ce qui fait la force d'une oeuvre à mon sens, c'est aussi l'énergie qui est insuflé, transmise par ses créateurs. Rien ne peut remplacer cela. Le dévouement à leur travail (parfois trop pour leur propre santé) des américains du nord et japonais et quelque chose d'admirable, qui tient parfois du sacrifice personnel. Rien que cela vaut le respect. Je suis désolé de le dire, mais j'ai 36 ans et je l'ai rarement vu ici (rarement, mais parfois) .Et de l'expérience j'en ai eu quelques unes. En passant aussi par celle du vieux producteur ( a qui on ne l'a fait pas) qui essaye de voir s'il peut pas vous "bais.." d'une manière ou d'une autre. Echec et mat pour sa part! Et ca aussi les négociations qui tournent mal ca fait parti du boulot. Un créatif doit savoir négocier... Et rompre les négociations également!!! Ne pas se laisser faire!!!
Il y a cinq ans après avoir travaillé pour une grosse boîte d'animation franco-belge je me faisais la réflexion suivante: A force de vouloir plaire au plus grand nombre on finit par ne plaire à personne... Nous sommes en pleine transition les anciens (ceux qui ont plus de 50 ans) ne retrouvent plus leur repère, le numérique change profondément la donne. Notamment sur les moyens de production. Ils n'ont bien souvent plus que leur carnet d'adresses.Et la nouvelle génération, celle qui doit prendre le relais doit inventer, innover de nouvelles formes de prods, ou la valeur de la propriété intellectuelle ne sera pas sous-évaluer selon des critères seulement subjectifs ( j'ai envie de dire parisianiste) mais au contraire en essayant d'en réaliser tous le potentiel créatif et financier. Parce que l'argent fait aussi parti de la réussite d'une oeuvre et des prochaines à suivre. Même si ce n'est qu'un aspect d'une oeuvre accomplie. Cette dernière doit aussi pouvoir être diffuser sur d'autres supports afin de solidifier son existence.
A mon sens il n'existe rien de pire qu'une oeuvre sans personnalité.
elle montre à quel point le système en général peut affaiblir les individus,
et conséquemment les oeuvres qu'ils sont susceptibles de présenter. Le cinéma américain n'en est pas exempt.
Mais dire cela du système de prod américain c'est avoir une méconnaissance des oeuvres qu'il produit, indépendamment pour certaines d'entre elles. C'est aussi mal connaître les écueils auxquels sera confronté en France tous créateurs qui "veut" dire quelque chose. Parce qu'après tout c'est cela qui a de l'importance non? Dire quelque chose, avoir un propos, un avis, que l'on va essayer de "partager" avec d'autres... en images.