salut Jerôme!
Oui, je me doute, des compromis... j'imagine... comme à chaque fois qu'il faut "gagner sa croûte", non?... mais il y a quand même de la liberté, pour les élus du microcosme de l'Art, je veux dire,
esthétiquement, par rapport à nous, besogneux de festivals:
la liberté de ne pas être jugé à l'aune du savoir-faire, la liberté de remettre en question ce qui chez nous fait partie des "évidences" du
métier.
C'est pour ça que leur exemple est, pour moi, très ravigotant. Bien qu'inaccessible !!!
Par exemple, j'ai vu à Londres un documentaire sur Robert Breer, un cinéaste américain, ami de Man Ray, qui débuta sa carrière dans les années 1950: on le voyait faire des dessins animés, dans son atelier entouré de verdure, au gré de l'inspiration du jour, au gré des objets ramassés (feuille, clé..). Et il expliquait que, pour lui, la déformation ("involontaire", s'entend) était une donnée incompressible du dessin animé. Qu'alors que l'industrie s'échine (par une organisation hiérarchique, un formatage par les model-sheets, des checking...) à maintenir les proportions des personnages, leur ressemblance -de soi à soi- au long du film, lui, il considérait que la déformation, c'était bien une qualité du médium dessin animé, qu'au lieu de la combattre (tel sisyphe?), il l'acceptait: c'est, expliquait-il, ce qu'un artiste doit faire: utiliser un médium pour ses potentialités, et
magnifier ces potentialités.
On a regardé le documentaire, on a soupiré...
il est trop fort!, et on est retourné à nos tables lumineuses, où, sans travailler dans l'industrie, nous nous échinions pourtant, étudiants méticuleux, à respecter en quelque sorte nos propres modelsheets... esclaves de nous-même !!!
Alors les propos de Robert Breer étaient, c'est vrai, ceux d'un "animateur plasticien". Ce serait un peu comme un poète DADA déclamant au milieu de l'Académie Française...
Je ne sais pas comment en tirer parti dans mon travail, mais je les trouve réjouissants... j'aime bien être bousculée dans mes à-priori ! et il y a aussi le plaisir enfantin de voir déboulonné
tout ce qu'on m'avait appris (et que je n'ai pas jeté au panier dans la foulée, je vous rassure...)
Si vous voulez voir
une interview de Robert Breer (mais malheureusement, pas
l'interview dont je parle plus haut), et à la fin de l'interview son film
Récréations, qui date de sa période parisienne (et surréaliste), le tout en qualité correcte (à part ça, je n'ai trouvé que de piètres screeners sur le web)
http://www.der.org/films/screening-room-robert-breer-preview.htmlEt ici un texte en français retraçant sa carrière:
http://www.frac-franche-comte.fr/scripts/fiche-exposition.php?id_expo=7
Enfin... vive les passerelles! et vive la curiosité!(pour ma part, je découvre avec intérêt sur ce forum des productions jeu vidéo, monde qui m'était resté jusqu'alors assez inconnu)
